La Matinale de l'Ordre

La Matinale de l’Ordre #15 : Journée Internationale des Infirmières - Quel avenir pour la profession infirmière en France et à l’étranger ?

Publié le 19 mai 2021
Mis à jour le 24 mars 2023

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À l’occasion de la Journée Internationale des Infirmières, ce 12 mai 2021, qui avait pour thème « une vision pour les soins de demain », et alors que 40% des infirmiers déclarent vouloir changer de métier1, l’Ordre National des Infirmiers a réuni Caroline Roy, Directrice déléguée, relations avec les partenaires externes de l’Ordre des Infirmières et des Infirmiers du Québec, Gaëtan Lafortune, Senior Economist à la Division de la Santé de l’OCDE, Alain-Michel Ceretti, ancien Président de France Assos Santé, et Patrick Chamboredon, Président de l’Ordre National des Infirmiers autour de la question «  Quel avenir pour la profession infirmière en France et à l’étranger ? ». Synthèse des échanges.


De nouveaux enjeux sanitaires demain


Tous les intervenants ont partagé une même analyse : aujourd’hui, notre système de santé n’est pas armé pour faire face aux grands enjeux sanitaires de demain. Avant même la pandémie, a rappelé Gaëtan Lafortune, l’OCDE observait un ralentissement des gains de l’espérance de vie dans le plusieurs pays, dont la France, notamment à cause des épidémies de grippe et des maladies chroniques.


La crise de la covid19 a par ailleurs mis en lumière avec violence les failles du système de santé. « Cela fait 15 ans que les infectiologues nous disaient qu’une pandémie allait arriver et mettre notre système de santé à terre », a déploré Alain-Michel Ceretti. « Ce jour est arrivé, et notre système de santé n’était pas prêt. Pourquoi ? car en France comme au Québec, on a trouvé que le système de santé, et l’innovation, coûtaient trop cher. On a donc estimé qu’il fallait prendre le sujet du système de santé par l’offre et non pas par le besoin. On a fermé des lits, on a fermé des hôpitaux, on a réduit le numérus clausus, en pensant que les malades iraient moins voir les professionnels de santé quand il y en aurait moins. » D’où la situation de crise, telle que nous la connaissons actuellement. Car le risque d’une telle paupérisation, souligne-t-il, est bien de se retrouver « avec des établissements qui ont des systèmes de plus en plus anciens, et des hôpitaux dans un état déplorable, avec des conditions de vie des soignants et des patients indignes ».


Les observations sur le terrain rejoignent ce constat. Selon une enquête de l’Ordre National des Infirmiers, menée du 30 avril au 5 mai 2021, à laquelle plus de 30 000 infirmiers ont répondu, 64% des infirmiers ont le sentiment que, malgré les enseignements de la pandémie, nous ne sommes pas mieux armés collectivement face à de nouvelles crises, rappelle Patrick Chamboredon.


Face à cette réalité, Gaëtan Lafortune souligne deux nécessités : celle de revenir à certains fondamentaux, comme la prévention, et celle pour nos systèmes de santé d’innover, à la fois sur le plan des technologies médicales et sur le plan de l’organisation. Une vraie réflexion sur les moyens que nous mettons dans le système de santé est pour cela cruciale, alerte Alain-Michel Ceretti, alors que les besoins en soins vont être croissants dans les prochaines années. Enfin, la crise sanitaire appelle à une revalorisation des compétences infirmières.


Au Québec, indique Caroline Roy, la crise a ainsi provoqué une forte mobilisation des infirmiers, afin que leurs compétences soient mieux reconnues. Cette reconnaissance constitue en effet une clé pour favoriser l’accès aux soins et pour la prévention d’incidents. « Au Québec, les infirmières sont appréciées pour leurs qualités et non leurs compétences professionnelles. Tout l’enjeu est cette reconnaissance des compétences », conclut Caroline Roy.


Quel rôle pour les infirmiers dans le système de soins aujourd’hui ?


Le rôle des infirmiers dans le système de soins varie largement selon les pays. Ainsi, au Québec, la loi 90 a été un tournant pour la profession infirmière, signale Caroline Roy. Avant, les infirmières agissaient par délégation médicale. Entrée en vigueur en 2003, cette loi octroie désormais aux infirmiers une certaine autonomie : dans la surveillance clinique, la détermination de soins infirmiers ou l’autonomie dans la vaccination par exemple.


Une situation qui apparait encore lointaine pour la France. Patrick Chamboredon explique ainsi : « Le Québec est un laboratoire pour nous, nous en sommes parfois encore loin. Prenons la vaccination : il a fallu se battre, avec France Assos Santé, pour libérer le geste vaccinal dans le cadre de la COVID19. Il faut faire évoluer notre décret d’actes. » 


Demain, une profession infirmière plus autonome


Pour faire face aux besoins de demain, la profession infirmière doit nécessairement acquérir plus d’autonomie. A court terme, la profession estime à 90% qu’il est nécessaire de faire évoluer le décret de compétences, dont la dernière révision date de 2004, rappelle Patrick Chamboredon. Gaëtan Lafortune ironise sur la situation : « On se dit que ça devrait quand même être plus simple de créer des rôles avancés pour les infirmiers que d’envoyer des hommes sur la Lune… ». D’autant plus que toutes les études réalisées montrent que cette extension des compétences se fait sans aucune conséquence négative sur la qualité des soins, la sécurité pour les patients ou leur satisfaction rappelle-t-il. Une position que partage Alain-Michel Ceretti, qui regrette : « un IDE n’a pas la latitude de pouvoir agir sur une personne, car derrière, on a systématiquement un frein. Et ce frein, c’est la présence du médecin ».


Les infirmiers souhaitent non seulement voir leur champ de compétences élargi mais également leur contribution mieux reconnue. Des possibilités d’évolutions doivent également être créées pour maintenir l’attractivité de la profession : « Tout se joue autour de la formation et du maintien de l’attractivité de la profession. Vais-je avoir un déroulé de carrière ? pouvoir changer d’orientation, de spécialité ? Il faut que les infirmiers puissent répondre à ces questions » explique ainsi Patrick Chamboredon.


Alain-Michel Ceretti pointe également du doigt la nécessaire présence des infirmiers dans les systèmes de gouvernance, et propose, pour renforcer l’attractivité de la profession, d’ajuster la rémunération des infirmiers, actuellement trop faible, à leur niveau de responsabilité et aux compétences qu’ils ont acquises pendant plusieurs années.


Pour voir le replay :



Pour consulter les résultats de la consultation de l’Ordre : https://www.ordre-infirmiers.fr/actualites-presse/articles/les-infirmiers-sinterrogent-sur-leur-avenir-et-souhaitent-des-evolutions-profondes-de-leur-metier.html


1 Consultation menée par l’Ordre National des Infirmiers du 30/04 au 05/05 2021, à laquelle plus de 30 000 infirmiers ont répondu.

 

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