Crise Covid, déconfinement : 4 mesures plébiscitées par les infirmier(e)s
1. Statut de pupille de la Nation
(pour les enfants de professionnels de santé décédés)
2. Prescription des tests
3. Télésoin infirmier facilité et étendu
4. Tous les équipements de protection nécessaires
Paris, le 14 mai 2020
Dans un contexte marqué à la fois par plusieurs semaines de crise, durant lesquelles les infirmiers ont été particulièrement engagés, et par l’entrée dans une phase de déconfinement progressif, qui présente de nouveaux enjeux sanitaires et mobilisera tout autant (mais différemment) la profession, l’Ordre National des Infirmiers a souhaité consulter les infirmières et les infirmiers de toute la France sur leurs priorités.
Plus de 70 000 infirmier(e)s ont répondu à cette nouvelle consultation, réalisée en ligne, du 7 au 12 mai 2020.
« Pupilles de la nation » : une juste reconnaissance
Les infirmiers soutiennent très majoritairement (86%) la proposition portée par l’Ordre National des Infirmiers de reconnaître comme pupilles de la Nation les enfants des professionnels de santé décédés des suites du Covid-19.
Nous avons demandé cette mesure il y a près d’un mois et l’avons présentée à des élus locaux et des parlementaires qui l’ont défendue dans l’hémicycle et dans les médias, à l’image de Jean-Luc Moudenc, Président de France Urbaine et Maire de Toulouse. Nous poursuivons donc notre mobilisation pour qu’elle puisse être adoptée dans les meilleurs délais.
Prescription des tests de dépistage, développement du télésoin infirmier, fourniture d’équipements de protection
Trois mesures prioritaires pour le déconfinement
Interrogés sur les mesures demandées par l’Ordre National des infirmiers ces dernières semaines, les infirmiers plébiscitent trois actions prioritaires pour la phase de déconfinement :
- La prescription des tests de dépistage ;
- Le développement du télésoin infirmier ;
- La fourniture d’équipements de protection.
Autoriser les infirmiers à prescrire les tests de dépistage
Clé de voute d’un déconfinement réussi, la capacité à réaliser massivement des tests de dépistage reste encore conditionnée à la possibilité matérielle et humaine d’y parvenir. Un renfort des infirmiers, présents partout en France, et intervenant notamment au domicile des patients, pourrait considérablement changer la donne. Près des deux tiers des infirmiers souhaitent être autorisés à prescrire ces tests.
Cette disposition a été portée par plusieurs députés sous forme de proposition d’amendement à la loi sur la prolongation de l’état d’urgence sanitaire. L’amendement n’a toutefois pas été adopté. Pour déployer une stratégie de dépistage du plus grand nombre, il nous semble pourtant essentiel de s’appuyer sur la 1 ère profession de santé par le nombre.
Faciliter la mise en œuvre du télésoin
L’Ordre National des Infirmiers a obtenu la mise en place en urgence du télésoin le 19 mars dernier, afin de permettre aux patients atteints du Covid-19 de bénéficier sur prescription médicale d’une surveillance à distance (via vidéo ou téléphone) réalisée par un infirmier.
Selon une précédente consultation réalisée début avril, 65% des infirmiers souhaitaient inclure le télésoin dans leur pratique. Cinq semaines plus tard, 20% d’entre eux déclarent l’avoir mis en place. Or, 46% des infirmiers estiment que toutes les conditions ne sont pas réunies pour mettre en place le télésoin infirmier.
Nous demandons donc aux pouvoirs publics de faciliter et étendre la mise en œuvre du télésoin :
- en informant davantage la population ;
- en permettant aux infirmiers de prescrire eux-mêmes le télésoin pour leurs patients ;
- en publiant les décrets d’application relatifs au télésoin infirmier pour tous les patients (et pas exclusivement pour les patients atteints du Covid) comme le prévoit la loi santé promulguée en juillet 2019.
Fournir tous les équipements de protection nécessaires aux infirmiers
Selon les résultats de notre consultation, 47 % des infirmiers déclarent ne pas disposer de protections adaptées en quantité suffisante (contre 74% début avril, avec la même méthode de consultation).
Les infirmiers libéraux sont encore plus touchés : 63% manquent encore de matériel de protection.
Les surblouses manquent toujours cruellement : 86% des infirmiers consultés déclarant manquer de matériel de protection indiquent ne pas disposer de surblouses en quantité suffisante (+3 points par rapport à la consultation du mois d’avril).
En outre, 54% des infirmiers consultés déclarant manquer matériel de protection disent ne toujours pas disposer de masques en quantité suffisante (-24 points par rapport à la consultation du mois d’avril). La situation reste alarmante, notamment dans certaines régions comme les DOM-TOM, en Île-de-France et en région PACA.
Alors que la crise a démarré depuis plus de deux mois et que s’amorce une première phase de déconfinement, l’Ordre National des Infirmiers rappelle le besoin critique de protéger les infirmiers, en leur garantissant l’accès à tous les équipements de protection nécessaires, et ce, sur l’ensemble du territoire, dans des hôpitaux, en EHPAD, en établissement médico-sociaux ou à domicile. En dépit d’améliorations notables, l’approvisionnement reste encore très hétérogène et insuffisant.
Enseignements de la crise : la nécessité de faire évoluer la profession
Interrogés sur les premiers enseignements observés sur leur pratique durant la crise, les infirmiers ont relevé, pour plus de la moitié d’entre eux, qu’ils sont les derniers professionnels de santé à continuer à se déplacer au domicile de leurs patients. Plus de 80% des infirmiers libéraux partagent ce constat. Derniers maillons du suivi à domicile, les infirmiers jouent un rôle essentiel dans le suivi et la continuité des soins, tant pour les patients chroniques que pour les patients contaminés au Covid. C’est pourquoi ils doivent pouvoir constituer demain la pierre angulaire du système de santé à domicile.
Second enseignement, relatif au parcours de soins : 53% des infirmiers déclarent avoir pu observer des difficultés dans l’orientation ou l’accès aux soins des patients atteints de maladie chronique. Près de 35% des infirmiers consultés estiment que l’absence de prescription a parfois pu être un frein pour l’accès aux soins, par exemple en cas d’absence de médecin, de difficulté à se déplacer faute de transports, etc. Il semble indispensable de revoir l’organisation du système de soins et la place donnée aux infirmiers au sein de celui-ci.
Sur la base de ces enseignements, les trois quarts des infirmiers estiment que leur champ de compétences doit être élargi. Nous appelons les pouvoirs publics à engager dans les plus brefs délais la révision des textes qui encadrent l’exercice de la profession infirmière.
« Dans cette crise sanitaire inédite, les infirmiers sont particulièrement mobilisés. Certains ont malheureusement perdu leur vie dans cette bataille. Pour les enfants de professionnels de santé décédés des suites du Covid, nous réitérons solennellement notre demande de leur accorder le statut de pupille de la Nation.
Par ailleurs, la phase de déconfinement progressif dans laquelle le pays s’engage présente de nouveaux enjeux sanitaires : réalisation de tests, poursuite des soins pour les patients contaminés, reprise des soins et suivi des patients chroniques… Il faut d’abord veiller à ce que les infirmiers puissent exercer en toute sécurité, pour eux comme pour les patients, et donc s’assurer qu’ils disposent de tous les équipements de protection nécessaires. Les infirmiers souhaitent aussi pouvoir prescrire et réaliser les tests de dépistage du Covid, ce qui nous semble nécessaire pour déployer une stratégie de dépistage à grande échelle. A l’image du développement de la télé-consultation médicale, la mise en œuvre du télésoin infirmier doit être facilitée.
Enfin, les premiers enseignements de cette crise nous confirment qu’il est indispensable de faire évoluer les textes qui encadrent l’exercice de la profession infirmière. »
Patrick Chamboredon, Président de l’Ordre National des Infirmiers
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