L’Ordre National des Infirmiers publie sa contribution au Ségur de la Santé
Pour une meilleure reconnaissance de la profession infirmière au sein d’un système de santé plus efficace, plus durable, et plus humain
Selon la dernière consultation de l’Ordre (réalisée du 12 au 17 juin - 61 000 répondants), 98% des infirmiers consultés estiment que « la profession infirmière n’est pas reconnue à sa juste valeur au sein du système de santé » et 92% « sont favorables à un renforcement de l’autonomie des infirmiers pour une meilleure prise en charge des patients »
Principaux enseignements de cette consultation ci-dessous
Résultats complets dans la Contribution au Ségur de la Santé de l’Ordre National des Infirmiers
Paris, le 06 Juillet 2020
L’annonce de l’ouverture d’un « Ségur de la Santé » a suscité de grandes attentes parmi les professionnels de santé. En première ligne tout au long de la crise du Covid 19, les 700 000 infirmiers de France (première profession de santé par le nombre) ne doivent pas retomber dans l’oubli à l’heure de la refondation historique de notre système de santé.
Au-delà de la nécessaire revalorisation financière, c’est une reconnaissance globale de leur profession que les infirmiers demandent : compétences, salaires, carrière, davantage de coordination avec les autres professionnels de santé…
Si ces évolutions sont nécessaires pour la profession infirmière, elles sont surtout indispensables pour garantir une prise en charge des patients de qualité, rendre notre système de santé plus durable, plus efficace, et plus humain, et lui permettre de relever les enjeux qui se présentent à lui : vieillissement de la population, augmentation des besoins de santé, des maladies chroniques…
C’est cette approche qui a guidé l’Ordre National des Infirmiers dans la réalisation de sa Contribution au Ségur de la Santé. Nous avons souhaité faire une seule contribution, et non pas une par pilier, car chacune de nos contributions a été pensée pour répondre aux enjeux des quatre piliers du Ségur en même temps.
Ce document s’appuie notamment sur :
- Le Livre blanc de la profession infirmière (2019) ;
- Les résultats de 3 consultations de l’ensemble de la profession infirmière - entre 61 000 et 70 000 répondants - effectuées entre avril et juin 2020 ;
- Les retours des élus locaux de l’Ordre des infirmiers ;
- De nombreux échanges avec des experts du milieu de la santé, ainsi que le rapport du cabinet Asterès qui a étudié les effets d’un élargissement des compétences des infirmiers sur la prise en charge des patients, l’organisation des soins, ainsi que son impact économique.
Principales Propositions
Pour un système de soins plus efficace, plus durable et plus humain
Pour rappel, les textes qui encadrent l’exercice de la profession n’ont pas évolué depuis 2004 (décret 2004-802 du 29 juillet 2004), en dépit de nombreuses réformes du système de santé. Or, l’extension du rôle des infirmiers s’est développée dans plusieurs pays à travers le monde : Etats-Unis, Canada, Royaume-Uni, Suisse… Les nombreuses études scientifiques menées sur le sujet démontrent des bénéfices significatifs pour les systèmes de santé concernés.
- Une plus grande autonomie pour une meilleure prise en charge des patients
Exemples : reconnaissance de la consultation infirmière, possibilité d’adapter la posologie des traitements dans le cadre des maladies chroniques, étendre le champ des prescriptions infirmières (pansements médicamenteux, examens de biologie…), transférer certains actes du rôle sous surveillance médicale au rôle simplement sous prescription, reconnaître davantage les compétences spécifiques aux infirmiers de pratiques avancées (IPA)… - La prévention et l’éducation thérapeutique, clés de voûte d’une société du soin.
Exemples : possibilité de prescrire et administrer des vaccins obligatoires et recommandés, prescrire des tests de dépistage (notamment COVID 19), déclencher des actions d’éducation thérapeutique dans le cadre des maladies chroniques… - Les infirmiers, pivots entre la ville et l’hôpital.
Reconnaître pleinement les infirmiers comme des cliniciens acteurs du premier recours. Plusieurs expérimentations (au titre de l’article 51 de la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017) ont démontré l’efficience de telles mesures. - La nécessaire revalorisation de la formation infirmière.
Exemples : réactualiser la maquette de formation initiale pour l’adapter aux besoins de santé actuels, développer et finaliser le processus d’universitarisation, promouvoir et faciliter la recherche en sciences infirmières, favoriser une vraie logique de carrière (diplômes bac +3 / bac+5)… - Répondre aux enjeux de demain : accélérer le virage numérique et s’inscrire dans une démarche d’accompagnement du patient face aux risques environnementaux.
Exemples : développer le télésoin, le rôle de l’infirmier dans le cadre des créations, mises à jour et consultations de Dossier Médical Partagé, le rôle de l’infirmier pour favoriser l’accès aux outils numériques par le plus grand nombre de patients… Par ailleurs, les infirmiers peuvent être des acteurs clés dans la sensibilisation du public aux risques sanitaires liés à la dégradation de l’environnement. - Une meilleure représentation des infirmiers dans le système de santé.
Exemples : reconnaître aux infirmiers le statut de « professionnel de santé » (et non auxiliaire médical), déployer plus d’infirmiers de jour comme de nuit et définir des quotas infirmiers / patients, positionner les infirmiers dans la gouvernance du système de santé, à tous les échelons, dans les établissements ainsi que dans les instances de décision locales, régionales et nationales.
Qu’en pensent les infirmiers ?
Enseignements des dernières consultations
Les maux d’une «profession vocation» en quête de reconnaissance et d’évolution du système de santé
L’Ordre National des Infirmiers a mené 3 consultations successives entre avril et juin 2020. La dernière, à laquelle 61 000 infirmiers ont répondu, a été réalisée en ligne du 12 au 17 juin.
Parmi les principaux enseignements :
- 91% des infirmiers consultés déclarent « être fiers de leur profession » et 74% disent avoir choisi cette profession car « ils aiment s’occuper des autres ».
- Mais moins d’un infirmier sur deux se dit « satisfait de son métier » et 70% « ont le sentiment que leurs conditions d’exercice se sont dégradées au cours des 5 dernières années ». Avec le recul, moins d’un infirmier sur deux choisirait à nouveau ce métier (42%).
- 98% des infirmiers consultés estiment que la profession infirmière n’est pas reconnue à sa juste valeur au sein du système de santé.
- 92% des infirmiers « sont favorables à un renforcement de l’autonomie des infirmiers pour une meilleure prise en charge des patients ».
A titre d’exemples :- 92% des infirmiers sont favorables à la reconnaissance et à la formalisation de l’existence de la consultation infirmière » ;
- 92% d’entre eux sont favorables à une permission de pratiquer tous les actes qui ne nécessitent pas de diagnostic (ex : vaccins) ;
- 79% souhaitent que l’infirmier puisse adapter des prescriptions ;
- 73% estiment que « la prescription médicale rend parfois difficile l’accès aux soins ».
- 94% des infirmiers consultés considèrent que notre système de santé, tel qu’il est organisé aujourd’hui, « n’a pas la capacité de répondre aux grands enjeux sanitaires de demain (vieillissement de la population, maladies chroniques, désertifications médicale…) » et 98% des infirmiers pensent que « notre système de santé devrait être plus orienté vers la prévention et l’éducation thérapeutique ».
- 95% des infirmiers consultés souhaitent voir le Ségur de la santé déboucher sur des évolutions conséquentes pour la profession infirmière. Si 40% des infirmiers consultés pensent que le Ségur bénéficiera de quelques améliorations suite au Ségur, 44% estiment que le Ségur ne l’impactera pas et 13% considèrent même que les conditions d’exercice vont encore se dégrader.
Vous trouverez plus de détails sur les enseignements des différentes consultations effectuées entre avril et juin 2020 en pages 11, 12 et 13 de la Contribution au Ségur de la Santé de l’Ordre National des Infirmiers, puis en appui des recommandations détaillées au sein de la partie « Les évolutions nécessaires au service de l’usager du système de santé » (pages 15 à 37).
L’analyse du cabinet Asterès
Impact sur la prise en charge des patients et sur l’organisation des soins.
Impact économique.
Afin d’enrichir sa Contribution au Ségur de la Santé, l’Ordre National des Infirmiers a sollicité le cabinet Asterès pour que ce dernier étudie les effets d’un élargissement des compétences des infirmiers sur l’organisation des soins et sur les finances publiques. Une revue de la littérature scientifique internationale a notamment été effectuée.
Selon le rapport du cabinet Asterès, une plus grande autonomie des infirmiers permettrait de répondre aux différents défis que doit relever le système de santé français :
- Défi sanitaire : l’infirmier permet de maintenir la qualité des soins dans un contexte d’augmentation de la demande de soins ;
- Défi structurel : l’élargissement de son rôle améliore la productivité du système tout en revalorisant le rôle des médecins ;
- Défi organisationnel : sa plus grande autonomie permet de réduire les délais de prise en charge des patients au sein des structures existantes ;
- Défi démographique : l’évolution des effectifs infirmiers compense la baisse de la densité de médecins généralistes dans un contexte de vieillissement de la population ;
- Défi économique : l’élargissement des compétences de l’infirmier génère d’importantes économiques.
Le cabinet Asterès a réalisé une analyse spécifique à chacune des propositions détaillées dans la partie « Les évolutions nécessaires au service de l’usager du système de santé » (pages 15 à 37) de la Contribution au Ségur de la Santé de l’Ordre National des Infirmiers.
« C’est grâce à une juste reconnaissance des compétences cliniques et de la place de l’infirmier dans le système de santé que nous pourrons construire une organisation sanitaire efficiente, plus humaine mais aussi ne laissant aucun patient de côté. C’est l’objet de notre Contribution au Ségur de la Santé : construire la pratique infirmière de demain pour l’ensemble des usagers du système de santé. »
Patrick Chamboredon, Président de l’Ordre national des infirmiers
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