Infirmiers de sapeurs-pompiers : un état des lieux des pratiques soignantes dans la perspective de la révision du décret infirmier
L’Association Nationale des Infirmiers de Sapeurs-Pompiers, en partenariat avec l’Ordre National des Infirmiers et le Conseil National Professionnel Infirmier Secours Pré-hospitalier, publie une étude sur les pratiques infirmières. Réalisée auprès de l’ensemble des services départementaux d’incendies et de secours (SDIS) de Métropole, de la BSPP et des services des départements et régions d’outremer, cette démarche s’inscrit dans le droit fil de la réécriture du décret-infirmier, visant à reconnaître les compétences déjà mises en œuvre dans les services d’incendie et de secours.
Aide médicale d’urgence
La consultation, qui a recueilli 100% de réponses en métropole, et 66% en outremer, se penche en premier lieu l’aide médicale d’urgence : depuis 2016, les protocoles infirmiers de soins d’urgence (PISU) sont mis en œuvre en cas d’urgence, quand la situation clinique de la victime justifie de ne pas attendre la présence d’un médecin sur les lieux de l’intervention. En moyenne, les SDIS de Métropole disposent de 17 protocoles, allant fréquemment au-delà des préconisations afin de s’adapter aux besoins du terrain.
Santé en service
Presque dix ans après leur mise en œuvre, seuls 28% des SDIS réalisent des entretiens infirmiers en santé et service, alors que les besoins de suivi des sapeurs-pompiers sont élevés. 54% des SDIS autorisent leurs ISP à prescrire les vaccins et assurer le suivi vaccinal, au premier chef la vaccination COVID (30%), les vaccins obligatoires (28%) et la grippe (23%). Le développement du raisonnement clinique par une consultation d’ISP est l’une des quatre axes retenus parmi les compétences innovantes à développer dans les cinq prochaines années.
Formation et tutorat
81 % des SDIS mobilisent les ISP dans les formations initiales ou de perfectionnement des sapeurs-pompiers volontaires ou professionnels, et 77% des SDIS permettent aux ISP d’accéder aux formations institutionnelles de formateurs. Selon l’étude, « la formation est un domaine dans lequel la polyvalence des ISP et son biculturalisme s’expriment totalement. Formateur en santé et formateur sapeur-pompier, les ISP bénéficient d’un double curriculum vitae « santé-secours ».
Évaluation des pratiques professionnelles
51 SDIS ont mis en place une démarche d’analyse qualitative des pratiques de soins. Elle concerne principalement l’étude des interventions des ISP, le soutien sanitaire opérationnel, la formation et la santé au travail. Par ailleurs, le déploiement du bilan XABCDE, centré autour des besoins physiologiques de la victime suivant le principe de « traiter en premier ce qui tue en premier » en suivant le parcours de l’oxygène, se poursuit : 75 SDIS l’utilisent.
Démarche clinique paraclinique
Les SDIS peuvent utiliser des aides cognitives (carnets, tablettes connectées, applications mobiles…) pour uniformiser la prise en charge des victimes, guider le raisonnement dans l’enchaînement des actions et améliorer les performances paramédicales des ISP dans la gestion des événements. 76 SDIS déclarent utiliser des aides cognitives. 34% des SDIS autorisent les ISP à réaliser des auscultations pulmonaires parmi les actes entrant dans le champ de l’amélioration de la démarche clinique.
Leadership
82 infirmiers en chef (sur 100) estiment qu’il est légitime et pertinent que l’ISP soit « chef de secteur secours d’urgence aux personnes (SUAP) » et plus d’un tiers de ces SDIS positionnent l’ISP sur cette fonction. 68 SDIS intègrent leurs ISP dans la coordination et l’encadrement d’un dispositif de soins et des SUAP. Seuls 13 SDIS forment leurs ISP au management (contrairement aux cadres de santé qui le sont à 100%). 50 SDIS forment les ISP aux compétences non techniques, 36 SDIS les forment aux facteurs humains et 22 SDIS aux biais cognitifs.
Soutien psychologique
80% des SDIS font appel aux compétences de psychologues ou professionnels de santé mentale, mais les ISP restent des acteurs de première ligne : dans 80% des SDIS, on fait appel à leurs compétences acquises en formations initiale et continue pour apporter une première réponse en soutien psychologique. 21% des SDIS font le choix de demander aux ISP de mettre en œuvre cette démarche sous protocole, alors que cette action relève du rôle propre et pourrait ainsi être plus largement mise en œuvre. Sur ces 80% des SDIS, les deux tiers font appel à des psychologues pour former les ISP à ces missions.
Recherche
Encore peu développée, la recherche sur les pratiques cliniques concerne 20 SDIS, qui participent à des travaux collectifs. Seuls 26 services de santé et de secours médical participent à la rédaction d’articles et de publications.
Et l’étude de conclure : « Les évolutions, prévues par la loi MATRAS, comme l’accès à des gestes de soins d’urgence, dont l’administration de médicaments, mais aussi les changements qui interviennent pour la profession d’infirmier génèrent une volonté d’être force de proposition pour élever le niveau de compétences des infirmiers sapeurs-pompiers au même rythme que les secouristes, et les infirmiers spécialisés. À ce titre, « la réécriture du décret du métier socle d’infirmier doit permettre à la loi de reconnaître les compétences déjà mises en œuvre, et notamment dans les services d’incendie et de secours ».